Au pays de Margaret Atwood, autrice du roman devenu série télévisée La Servante écarlate, une dystopie féministe dans laquelle les femmes sont réduites au rôle de mères porteuses, la possible remise en cause de l’arrêt Roe vs Wade aux Etats-unis a provoqué une onde de choc. A travers tout le Canada, radios, télévisions et journaux se sont emparés de l’éventuelle suppression du droit à l’avortement chez le voisin américain pour s’interroger sur un possible effet contagion. Au lendemain de la révélation par le site Politico de l’avant-projet de la Cour suprême des Etats-Unis évoquant la fin de ce droit constitutionnel établi depuis quarante-neuf ans, le débat s’est aussi immédiatement invité à la Chambre des communes, à Ottawa.
« Un seul moment d’inattention peut nous ramener des décennies en arrière », a mis en garde Christine Normandin, députée du Bloc québécois (indépendantiste), mardi 3 mai. « Le gouvernement est résolu à protéger le droit des femmes de choisir, un droit fondamental », lui a répondu la vice-première ministre, Chrystia Freeland, sous un tonnerre d’applaudissements. Absent de l’enceinte parlementaire, le premier ministre libéral, Justin Trudeau, publiait au même moment un message sur Twitter : « Le droit de choisir est un droit de la femme. Point final. »
La question d’une possible remise en cause de l’avortement a, en revanche, plongé dans l’embarras le Parti conservateur du Canada. Dans un courrier électronique envoyé à ses membres quelques heures après la révélation de Politico, l’équipe de communication du parti leur a prudemment enjoint de ne pas « commenter la fuite ». « Ce qui se passe aux Etats-Unis se passe aux Etats-Unis, c’est un enjeu qui a été réglé depuis des décennies au Canada et c’est tant mieux », a tenté d’éluder le député conservateur Gérard Deltell.